On découvre le Récit d’Edwige véritable globe-trotteuse, maman de deux enfants, elle va nous raconter son accouchement en Ecosse.
1.Bonjour Edwige, quel âge as-tu ? Ou habites-tu ? Et combien d’enfant as-tu ?
J’ai 35 ans, j’habite à Söderfors en Suède et j’ai deux enfants, un petit garçon de deux ans (avril 2017) et une petite fille de 9 mois (juillet 2018).
2.Comment as-tu découvert que tu étais enceinte ?
J’ai fait un test de grossesse à la mi-août 2017 alors que j’avais quelques jours de retard dans l’arrivée de mes règles, et il était positif ! Fin mars, j’avais fait une fausse couche, et j’attendais avec impatience de pouvoir retomber enceinte… Au Royaume-Uni, pas de prise de sang : quand on fait un test positif, on appelle son cabinet médical pour prendre rdv avec une sage-femme ou une infirmière (on ne choisit pas, la personne qui s’occupe de vous c’est celle qui est disponible, c’est tout), rdv qui a lieu environ 10-15 jours plus tard. Lors de ce rdv, la sage-femme vous demande un échantillon d’urine et prend votre tension. Elle vous donne des prospectus sur la grossesse et ce qu’on appelle « the blue file », un dossier à la couverture bleue que vous allez devoir amener à chaque rdv. Dans ce dossier, avec votre nom, votre NHS number et votre CHI number (numéros de sécurité sociale) on trouve la liste des rdvs qui auront lieu (par exemple : (5 sg ; rdv sage-femme ; 12 sg : première échographie, etc.), et seront ajoutés les résultats des examens que vous allez passer. C’est aussi dans ce dossier que vous allez écrire votre « birth plan », si vous souhaitez en avoir un. Bien sûr, il faut apporter ce dossier lors de l’accouchement. Et l’hôpital le garde, vous ne pouvez pas le conserver en guise de souvenir…
3. Comment la femme enceinte est perçue dans le pays ou tu as accouchée ? Est-ce qu’on la dorlote beaucoup ou on contraire on pose pas trop de questions ?
Le personnel médical ne pose pas beaucoup de questions, mais il reste très à l’écoute. Je ne me suis jamais sentie intimidée ou empêchée de poser des questions.
4.Comment s’est passé ta grossesse sur le plan physique ? Douleurs, contractions, problème de santé, fatigue ?
Une grossesse de rêve, si on la compare à celle d’autres femmes ! J’étais très fatiguée au premier trimestre et j’avais de fortes nausées (incapable de prendre le bus ou la voiture!), mais je savais que c’était très courant, pas de quoi s’inquiéter. Pas de grosses douleurs, pas de diabète gestationnel ou autres problèmes. J’ai continué à marcher et à faire du vélo tout au long de ma grossesse – je crois que la dernière fois que je prenais mon vélo c’était trois semaines avant d’accoucher, après ça, mon ventre était devenu trop gros ! Avec le recul, je me dis heureusement que ma grossesse s’est bien passée parce que le suivi médical était assez « à la cool ».
5. Comment était le suivi médical pendant tes grossesses ? Avais tu un médecin ou une sage-femme?
C’était soit une sage-femme, soit une infirmière qui me voyait. J’ai du rencontrer bien 5 personnes différentes au cours de ma grossesse, sans compter la sage-femme qui s’est occupée de moi pendant l’accouchement, une femme super mais que je n’avais encore jamais rencontrée et qui ne savait rien de moi (elle a pris connaissance des informations me concernant en consultant mon « blue file » quand je suis arrivée à la maternité).
J’ai aussi suivi, avec mon copain, des cours de préparation à l’accouchement (pris en charge par la sécu sociale britannique), où l’on nous expliquait aussi comment changer un bébé, comment l’habiller et lui donner le bain etc. C’était très sympa et je trouvais ça bien de pouvoir rencontrer d’autres couples/parents.
Ce qui m’a étonnée, parce que je savais un peu comment cela se passait en France, c’est qu’il n’y a que deux échographies lors de la grossesse. Et zéro examen gynécologique. Alors que mes amies françaises enceintes étaient toujours en train de me dire, ça va, mon col est ouvert à tant, moi je n’ai jamais su. La politique au Royaume-Uni, c’est que tant que tout va bien les examens ne sont pas nécessaires et qu’il faut laisser faire la nature. C’est ce qu’on m’a dit quand j’ai demandé s’il fallait que je prenne un laxatif avant l’accouchement : faire caca quand on accouche, c’est tout à fait naturel, et les sages-femmes ont l’habitude, donc ne vous inquiétez pas madame !
Aussi, j’avais un chat et très peur de la toxoplasmose, mais ils ne font pas des tests pour ça. J’ai quand même insisté, en disant que j’avais déjà fait une fausse couche, que j’étais très inquiète, et que j’aurais vraiment voulu savoir. Après moult négociations, ils ont accepté de me tester et il s’est avéré que je n’étais pas immunisée.
Le seul vrai examen que j’ai eu c’est celui pour le diabète gestationnel, mais j’aurais pu m’en passer parce que ce n’est vraiment pas agréable !
6. Ou as-tu accouché ?
J’ai accouché à la Royal Infirmary of Edinburgh, que j’avais choisie parce que certaines chambres ont des « birthing pools ». Mais on m’avait bien précisé qu’ils n’étaient pas à 100 % certains de pouvoir m’attribuer une chambre de ce type quand viendrait mon tour.
7.Qui était présent avec toi pendant l’accouchement ? Ton mari, ta maman, une amie, la sage-femme ?
Mon mari était présent, et la sage-femme était tout le temps là aussi. Elle a juste fait une pause d’une demi heure pour aller manger, et c’est une autre sage-femme qui l’a remplacée. J’ai trouvé ça super de pouvoir avoir la même personne avec moi tout au long du travail et de l’accouchement (mais j’aurais vraiment aimé être admise à la maternité plus tôt…) Deux autres sage-femmes sont arrivées dans la dernière demi-heure, alors que le bébé arrivait.
8. Maintenant le vif du sujet, comment as tu su que tu allais accoucher ? Pertes des eaux, contractions ?
Très fortes contractions espacées de 10 minutes vers 1h du matin le 13 avril, qui était la date de naissance prévue de mon fils. Comme c’était ma première grossesse, que j’étais dans un pays et un système dont je ne connaissais pas parfaitement bien le fonctionnement, et puis tout simplement parce que j’avais besoin d’être rassurée, j’ai appelé la maternité vers 2h. On m’a dit de rappeler quand les contractions seraient espacées de 5 minutes. Comme elles se rapprochaient, j’ai rappelé vers 6h du matin, puis vers 10h du matin. Elles étaient espacées de 7 à 5 minutes et j’aurais vraiment eu envie d’être à la maternité, avec un personnel qui sait ce qu’il fait, au lieu d’être seule à la maison avec mon mari… Mais la personne que j’avais au téléphone me demandait toujours d’attendre, en disant qu’au delà de 5 minutes d’espacement entre les contractions, on ne m’accepterait pas à la maternité. J’ai eu des contractions toute la journée, jusqu’au soir où vers 18h je les ai rappelés, elles étaient maintenant espacées de 4-5 minutes et je n’en pouvais plus. On m’a répondu, vous pouvez venir mais il n’est pas sûr qu’on vous garde. Arrivée à la maternité vers 19h, la sage-femme me dit que mon col est ouvert à 3 et que je peux rester. Elle procède à un décollement des membranes pour que ça aille un peu plus vite – en me prévenant mais sans vraiment me laisser le temps de donner mon avis. J’ai finalement accouché le 14 avril à 4h11 du matin…
9.Racontes-nous ton accouchement, long ou rapide ? Les douleurs et comment on t-as aidé à gérer ces douleurs ? Il y a t-il la péridurale dans ton pays ? Comment tu t’es sentie soutenue, aidée ? Dans quelle position as tu pu accouché ? Les actes médicaux ou non ? Complications ?
Un accouchement très très long d’après moi, mais pas tant que ça si on le compare à ceux vécus par d’autres femmes. Je ne sais plus exactement quand j’ai perdu les eaux, mais c’était très tard, je crois vers 1h ou 2h, et c’était tellement violent que j’ai vomi. Je n’ai commencé à vouloir « pousser » que vers 2h, et il a encore fallu plus de deux heures pour que le bébé sorte.
Le must du must, c’était la piscine. Je suis arrivée à la mater à 19h, et de 22h à 2h ou 3h (je ne sais plus exactement), j’étais dans l’eau chaude. Le bassin était assez grand pour que je fasse des mouvements, pour que je me tourne, etc. C’était magique. Je crois que je n’aurais pas réussi à gérer la douleur s’il n’y avait pas eu ça. A un moment je commençais à avoir faim et on nous a apporté, à moi et à mon mari, des toasts et du thé (so British haha), et ça m’a fait du bien. On m’a proposé du « gaz and air », un truc que l’on inspire au moment où la contraction arrive, mais cela me donnait la nausée, alors après quelques prises j’ai arrêté. La sage-femme m’expliquait comment respirer et m’inciter à bouger pour trouver la position qui me paraissait la plus adéquate.
J’ai commencé à pousser dans la piscine, puis la sage-femme m’a suggéré de sortir pour pouvoir faire plus de mouvements, j’ai poussé à quatre pattes, debout appuyée sur une barre, et puis finalement allongée. C’était extrêmement fatiguant et je me sentais un peu nulle de ne pas être plus rapide. Mais la sage-femme était très positive, très gentille et encourageante, elle était impressionnée que je n’utilise pas d’anti-douleurs. Quand à la fin j’ai crié que je voulais une péridurale parce que je n’en pouvais plus elle m’a répondu que c’était trop tard, mais que j’y étais presque et que je pouvais le faire. J’en ai bavé mais maintenant je suis contente de ne pas y avoir eu recours. Oui la péridurale existe, mais je n’en voulais pas et la sage-femme a respecté mon choix. Je voulais aussi éviter l’épisiotomie, bien sûr, et quand la sage-femme a dû m’en faire une elle s’est excusée mille fois, en disant qu’elle n’aimait pas faire ça, mais que nous n’avions pas vraiment le choix : mon fils avait le bras droit replié sur l’épaule gauche et, dans cette position, il était trop gros pour sortir. C’est très tard que la sage-femme s’en est rendue compte, en me manipulant et en m’examinant (et je me suis dit, mais pourquoi n’ont-ils pas fait une écho, cela m’aurait évité de pousser pour rien…) Évidemment, la présence de mon mari m’a beaucoup aidée aussi.
Après une injection de je ne sais plus quoi, j’ai expulsé le placenta. Puis la sage-femme a recousu mon épisiotomie en continuant de s’excuser.
10. Comment s’est passé l’après ? La rencontre avec bébé? L’allaitement ? A nouveau avais tu de l’aide pour les premières semaines après ton accouchement ? Comment te sentais-tu psychologiquement ?
Pendant que la sage-femme me recousait, mon fils faisait du peau à peau avec son père. Dans mon souvenir, sur le moment ça m’a paru normal, de ne l’avoir sur moi que quelques minutes, parce que c’est difficile de dorloter un petit quand on se fait recoudre, qu’on a mal et qu’il y a du sang partout. Maintenant je me dis que c’est un petit peu dommage. Je crois qu’avant de le donner à son père j’avais essayé de le faire téter, mais il n’y arrivait pas et moi-même je n’étais pas douée. Normalement, au Royaume-Uni, on sort de la maternité dès que le bébé a tété une fois (voir Kate Middleton sortir de la mater quelques heures après ses accouchements ne m’a jamais étonnée, ce qui ne veut pas dire que je cautionne ce genre de pratiques). Je n’arrivais pas à faire téter mon fils correctement, alors on m’a demandé de rester la journée du 14. Mon mari pouvait rester aussi. J’avais régulièrement des infirmières qui passaient faire des examens au bébé et surtout, surtout, voir si je m’en sortais avec l’allaitement. Chacune me montrait une position différente pour allaiter. On me demandait de le nourrir toutes les 3 heures et de noter le temps des tétées et l’aspect des couches. Comme le soir ça n’allait pas mieux, on m’a demandé de rester pour la nuit mais mon mari n’avait pas le droit d’être là. J’avais le coeur brisé, j’étais exténuée et je n’arrivais toujours pas à faire téter mon bébé correctement. J’ai passé la nuit à essayer de le nourrir, dans une pièce avec d’autres lits séparés par de simples rideaux et où on pouvait entendre les autres bébés crier. Le lendemain, ça allait un peu mieux, mais j’ai surtout beaucoup insisté pour rentrer, en promettant que si mon fils se nourrissait trop peu, je lui donnerais du lait articifiel. Si je n’avais pas insisté, ils m’auraient gardé, mais je trouvais ça trop déprimant de rester à la maternité.
J’ai un très bon souvenir de mon accouchement, grâce à cette sage-femme que j’ai beaucoup apprécié et au confort de la salle d’accouchement. Mais l’après a été très dur, en raison de la difficulté à allaiter et à ce que j’ai perçu comme un gros défaut d’accompagnement.
En Ecosse (et peut-être ailleurs au Royaume-Uni), une « health visitor » rend visite aux parents et au bébé plusieurs jours après la sortie de la maternité, notamment pour réaliser des actes qui, en France, auraient lieu à la maternité, et puis pour vérifier que tout se passe bien avec l’alimentation, en particulier en cas d’allaitement. 20 jours après la naissance de mon fils, alors que j’allais voir le médecin pour je ne sais plus quoi (un vaccin peut-être ?), il a diagnostiqué un frein lingual trop court. J’étais très en colère, parce que c’est sans aucun doute ce qui causait tant de difficultés dans l’allaitement (j’avais des crevasses, chaque tétée durait 1h et mon fils ne prenait presque pas de poids) et aucune des health visitors (il y en a eu deux différentes) qui m’ont observé allaiter n’ont pensé à regarder du côté du frein lingual. Comme j’avais déjà commencé à introduire des biberons de lait artificiel quand le diagnostic a été posé, j’ai refusé qu’on opère mon fils, j’avais déjà abandonné l’idée de l’allaitement. Je l’ai longtemps regretté mais plus maintenant ; pour ma fille, je n’ai eu aucun problème et j’ai pu l’allaiter sereinement autant que je le souhaitais.
Mis à part la période de l’allaitement, brève et chaotique, et le manque de conseils avisés, j’ai trouvé les health visitors plutôt gentils et compatissants. Ils voyaient bien que j’étais fatiguée, que je galérais, et j’ai beaucoup échangé avec elles à propos de mon état émotionnel et physique. Ce n’est pas quelque chose que j’ai retrouvé en Suède, ou il semble que tout soit centré autour de l’enfant.
11. Quels sont les traditions dans ton pays autour de la naissance ?
Plusieurs personnes nous on donné une pièce de un penny pour le bébé, pour lui porter chance ! Cela vient d’une tradition du Nord du Royaume-Uni et d’Irlande où il était d’usage de placer une pièce en argent dans la paume du nouveau-né, à la fois pour lui apporter bonheur et prospérité, mais aussi pour observer son comportement : certains bébé serrent la main et ne relâchent plus la pièce, d’autres la laissent tomber… Ce qui indique des tempéraments différents !
Une autre chose que nous avons remarquée – mais elle ne reflète peut-être pas le comportement de toute la population, bien sûr – c’est que toutes nos connaissances en Ecosse nous ont dit qu’offir des cadeaux aux enfants non encore nés pouvait porter malheur. Dans le même ordre d’idées sans doute, les parents préfèrent ne pas connaître le sexe de leur bébé avant la naissance.
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